La vie et l’oeuvre de Joseph Delteil confondues , font penser au titre de l’oeuvre majeure de Calderon de la Barca «la vie est un songe». Tant l’originalité des situations toutes en contrastes, en émaille le cours qui n’a rien d’un long fleuve tranquille. L’enfant illettré qui n’a jamais dit un seul mot de français jusqu’à l’âge de 5 ans va devenir un écrivain majeur dont on n’a pas encore mesuré l’importance; plus tard, le même fils du charbonnier vivant dans une forêt dans le Val de Dagne épousera Caroline Dudley issue de milieu bourgeois et progressiste de Chicago. Ce fils de rien pour qui la bonne société de Pieusse se mobilise pour payer les frais de scolarité, fait ses humanités à Limoux puis à Carcassonne et on le prédestine à la prêtrise – fait allégeance, à bon escient, à l’ingratitude et monte à Paris où il partage son temps entre la paperasse au Ministère de la marine et la vente au porte à porte de la Blanquette de Limoux. Sa plume lui démange, surtout la nuit. La parution de son premier roman «Sur le fleuve Amour» ( 1922) précédé de deux parutions “Le coeur grec” et “Le cygne androgyne”, lui ouvre les portes du sanctuaire surréaliste. Aragon et Breton devinent en lui le pourfendeur des vieux cadavres qui encombrent l’espace culturel du nouveau monde qui a élu Paris comme capitale. Justement celui d’Anatole France promu à des funérailles nationales tombe à point nommé. Delteil le consomme dans un pamphlet qui lui vaudra une citation dans le Manifeste du Surréalisme. Mais le même Breton n’a pas deviné l’aversion de Delteil pour les chapelles et les dogmes, sa relation fusionnelle avec le ciel et les anges . Et son inclination pour les personnages historiques à controverse “Napoléon”, “Lafayette”, “François d’Assises”, “les Poilus”, plus tard “Jésus II “, dans une pièce portée à la scène par Jean-Claude Drouot. Sa «Jeanne d’Arc» couronnée par le prix Fémina en 1925, est qualifiée de “vaste saloperie « par le pape du surréalisme dans un courrier que Delteil stigmatise avec élégance:»cette lettre-là, je préfère l’avoir reçue que l’avoir écrite». A Paris comme plus tard dans sa résidence de “la Massane” près de Montpellier, il capte l’attention des plus grands artistes du moment toutes disciplines confondues: les Delaunay, Chagall, Soulages, Arthur Miller et Lawrence Durell, Temple, Trenet, Brassens, Anaïs Nin, participe à des revues,continue à écrire après une période de doute sur l’utilité de la littérature publiant plusieurs ouvrages dont la très célèbre “ Cuisine paléolithique” couronnée par un prix international, et “La Deltheillerie” sorte de vade mecum rempli d’aphorismes et d’apophtegmes. Jacques Chancel et Jean-Marie Drot lui font fête à la télévision. Depuis sa retraite il condamne le nucléaire dernier combat de ce terrien convaincu de la quête du bonheur. “Ce que tu rêves, fais-le”.

Georges Chaluleau

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