Fils d’un médecin militaire venu s’installer à Carcassonne, Joe Bousquet, né à Narbonne, est l’écrivain et poète qui a certainement le plus marqué le monde littéraire en ce début du XXème siècle. Après le bac, il arrive à 16 ans à Souhtampton avant de revenir dans l’Aude. La guerre de 1914 voit son père mobilisé à Paris. Le jeune Bousquet le rejoint et à 18 ans devance l’appel. Son comportement héroïque et une blessure lui valent de nombreuses médailles. Mais le 27 Mai 1918, alors que sa compagnie est décimée, que tout le monde recule, le jeune lieutenant Bousquet reste debout face à l’ennemi. Une balle l’atteint aux vertèbres et endommage la moelle épinière : Joe Bousquet restera paralysé du bas du corps à vie. Certains ont cru voir dans son acte héroïque un désespoir amoureux, sa mère s’étant élevé contre un mariage avec une divorcée bitterroise. Il a 21 ans. Dés lors, il intégrera trois adresses: Rue de Verdun, dont la maison du 53 va devenir une sorte de salon littéraire surréaliste autour du paralysé. Ses amis du premier cercle carcassonnais, écrivains, peintres notamment avec René Nelli, Alibert, Estève…mais aussi tout ce que compte le monde des arts et de la littérature parisienne : Jean Paulhan, Directeur des éditions Gallimard, patron de la Nouvelle Revue Française qui, en 1940, se réfugiera à Villalier, Jean Cassou, Gide, Aragon, Paul Eluard et Gala, Paul Valéry, Hans Bellmer, Max Ernst, son ami qui fit plusieurs séjours à Carcassonne, bien d’autres encore et Henry de Monfreid, qui lui procurera un temps l’opium, venant tempérer ses douleurs. Jusqu’à sa mort, en septembre 1950, la chambre restera toujours sa thébaïde aux volets clos. Entouré de livres, sa pipe d’opium sur la tablette, Joe Bousquet, qui ne mettait jamais de tréma sur son prénom, outre ses nombreux ouvrages, dont le fameux « Cahier Noir », écrira dans la remarquable revue fondée par Ballard, « Les Cahiers du Sud » qui est, encore aujourd’hui, une référence en matière littéraire, artistique, philosophique du Sud de la France. Joe Bousquet laisse une prodigieuse correspondance avec tous ses amis écrivains et artistes éditée au cours du temps, y compris certains textes inédits, car il fut un rendez-vous permanent d’hommes de lettres, d’artistes et d’amis, sans parler de belles jeunes femmes, les anonymes et les autres, Ginette Augié, Poisson d’Or, Didi… L’amour reste le thème qu’il a le plus décliné avec, parfois, un érotisme brûlant transcendé, empreint également de mysticisme. Joe Bousquet repose à Villalier.
Jean-Yves Tournié